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La 5eme branche, ou l’arbre qui cache la forêt ...

18 juin 2020

Cette annonce du gouvernement n’est pas une surprise, la reconnaissance d’un cinquième risque a été évoquée depuis le début des années 2000 par les prédécesseurs d’Emmanuel Macron. Reprise au printemps 2018 par le Président, sous le vocable « Prise en charge des personnes âgées dépendantes », le sujet a été enterré sous les gilets jaunes et autres revendications sociales.

Mais que signifie le retour de ce serpent de mer sur le devant de la scène alors que les tentatives antérieures n’ont pas abouti ?

Pendant longtemps, le sujet de la prise en charge des personnes handicapées a été la préoccupation de quelques initiés, professionnels, bénévoles et parents directement impactés. Je ne reviendrais pas sur la genèse du secteur médico-social qui s’est construit en réponse aux besoins portés par le lobbying du secteur. Elle a abouti à une prise en charge institutionnelle, un peu chaotique au départ, puis plus organisée et qui s’est structurée au fil des réformes de 1975, puis en 2002 et 2005.

Un autre impact de ces réformes a été de révéler un secteur peu inclusif et en déphasage avec les aspirations d’égalité de traitement de personnes en situation de handicap.

Pêle-mêle, tous un tas de facteurs ont convergé pour faire exploser la bulle : les progrès de la médecine, la reconnaissance de maladies professionnelles invalidantes, l’allongement de la durée de vie, l’explosion des troubles musculosquelettiques… le tout ajouté à un changement de paradigme par rapport au handicap : l’idée s’installe que l’on passera peut-être tous un jour par la case perte d'autonomie !

L’émergence universelle d’un vocable de « parcours de vie », c’est-à-dire s’appliquant à l’ensemble des populations fait suite à celle du « projet de vie » réservé aux personnes en situation de handicap.

Résultat : les problématiques du handicap et du grand âge ont convergé vers une préoccupation unique : la reconnaissance et la compensation de la perte d’autonomie.

La création de la CNSA, en 2004 et 2005 et de ses missions répond à ce besoin de prise en charge de la perte d’autonomie, quelle que soit la population en cause. Le financement de la PCH (Prestation de Compensation du Handicap) et de l’APA (Aide Personnalisée à l’Autonomie) sera alors assurée principalement par les ressources de la «Journée de solidarité ».

A côté de cela, l’Assurance Maladie rembourse des dispositifs médicaux nécessités par la perte d’autonomie : Prothèses auditives, fauteuils roulants etc…

Or le sujet est actuellement d’avoir une approche globale : une vision d’ensemble des besoins et de la prise en charge de la personne.

C’est aussi le but du Dossier Médical Partagé, pour mettre cela en lien avec le sujet numérique.

Au niveau politique, le gouvernement cherche un thème citoyen et rassembleur. Les populations âgées et handicapées ont été durement éprouvés par la situation, et le manque de moyen des secteurs sanitaire, social et médico-social a été mis en lumière par la crise du Covid-19.

Quel est le risque de la création de cette 5ème branche ?

Déjà, la définition d'un socle de besoins est un vrai casse-tête.

Actuellement, on parle des besoins exprimés par les personnes, mais il n’y a pas plus subjectif, que les besoins exprimés de la personne pour pourvoir réaliser ce qu’elle considère comme « son projet de vie ».

Les besoins exprimés sont différents selon les départements, la vie en ville ou à la campagne, le niveau d’étude, la façon dont la personne est entourée…. Or sur ce dernier point, l’explosion du nombre de personnes vivant seules, passé de 6 à 16% entre 1962 et 2016, risque de complexifier la réponse.

Ensuite, reste la question du financement. Et dans une période qualifiée de récession par tous les économistes, ce n'est pas rien !

Le vrai risque est bien sur une rupture de l’égalité et du mécanisme de solidarité. Et cette rupture pourrait engendrer une fracture de plus dans la société.

Agnès Buzyn avait évoqué la création d’une deuxième journée de solidarité afin de répondre aux besoins croissants de financement …

Certains économistes prônent le recours à des financements privés et les réponses assurantielles sont nombreuses.

Toute la difficulté va être là, et le sujet va bien sûr se croiser, si ce n'est se télescoper avec celui de la réforme des retraites.